Commençons cet article par une petite histoire. Un ingénieur et un financier achètent une mine de fer. Ils sont ravis de sa production et peuvent investir dans une seconde entreprise. Cependant, ils ne parviennent pas à tomber d’accord. L’ingénieur veut acheter une sidérurgie car il pourra utiliser le fer pour produire de l’acier, qui se vend avec une meilleure marge. Le financier préfère acheter la brasserie d’à côté, car les mineurs y dînent une fois le travail terminé : c’est la promesse de flux d’argent, que la mine fonctionne ou pas.

La stratégie de Bernard Arnault est celle des ingénieurs. LVMH est le fruit d’une suite d’acquisitions bien pensées et d’une croissance importante du secteur du luxe. Étudions les grands traits de leur stratégie.

1. La constitution de LVMH

LVMH est né du regroupement de deux sociétés : Louis Vuitton, spécialisée dans la maroquinerie de luxe, et Moët Hennessy, groupe notamment spécialisé dans le champagne et les produits viticoles. Ce n’est pas Bernard Arnault qui est à l’origine de ce rapprochement. Cependant, il était alors le propriétaire des activités de couture de Dior. Il souhaitait récupérer les activités de parfumerie de Dior, qui était détenue par le tout nouveau groupe LVMH… EN 1987, à la faveur d’un krach boursier, il s’est allié avec Guinness pour acheter près de 40% des parts de LVMH. Il a ensuite racheté Guinness : le groupe LVMH était dans les mains de Bernard Arnault.

Toutes ces sociétés avaient des activités qui n’étaient pas liées à première vue : il n’existe pas de relation évidente entre l’activité d’une maison de mode et un exploitant viticole… Pourtant, Bernard Arnault et ses équipes avaient une vision : c’est le luxe qui lie ces entreprises. LVMH n’était plus un regroupement hétéroclite d’entreprises, mais une entreprise spécialisée dans le luxe au sens large. La qualité et l’expérience client exceptionnelle devinrent deux valeurs majeures du groupe. Elles d’appliquèrent aux entreprises nouvellement acquises : TAG Heuer, Bulgari, Berlutti, Loro Piana…

Cette stratégie est manifestement gagnante. Le chiffre d’affaires de LVMH a été multiplié par 3,36 en 15 ans[1]. Son résultat net a été multiplié par 7,16 sur la même période[2]. La société est devenue une magnifique machine à liquidités. Cette réussite pourrait se poursuivre car la recette de LVMH est toujours d’actualité.

2. L’avenir de LVMH

La stratégie en cours et future de LVMH s’articule autour de deux axes. Le premier est une innovation mâtinée de retour aux sources. Paradoxal ? Peut-être, mais pas pour les équipes marketing des différentes sociétés du groupe LVMH. Prenons un exemple : les équipes de la maison Christian Dior ont décidé de relancer l’activité de parfums après une quasi-absence d’environ 60 ans. C’était donc une activité existant par le passé, mais remise au goût du jour. Là encore, l’ancien côtoie le nouveau. Les laboratoires de création ont été installés à Grasse, terre ancestrale de la parfumerie à la française. L’effet est bien connu des praticiens du marketing : l’ancien est gage d’authenticité et de qualité. On retrouve là les valeurs directrices du marketing de LVMH.

Le second axe est le maintien d’une politique d’acquisition d’entreprises. Elle se poursuit en France, par exemple par l’acquisition des parfums de luxe Francis Kurkdjian en 2017. On voit ici un des axes de la politique du groupe de retour dans le domaine des parfums. Cette politique d’acquisition se poursuit également à l’étranger. Par exemple, LVMH a acquis en 2017 Colgin Cellar, un vignoble très renommé aux États-Unis, dans la Napa Valley. Ainsi, LVMH renforce son portefeuille de vins et spiritueux, tout en élargissant géographiquement son champ d’action.

Enfin, il peut être noté que LVMH prend grand soin de son image. En témoignent l’inauguration de la fondation Louis Vuitton en 2014, ou leurs diverses initiatives en faveur de l’art ou du droit des femmes[3].

LVMH a donc bâti un empire par des acquisitions et une solide politique marketing. Le groupe est parvenu à s’organiser autour de la notion de luxe, ce qui a permis un développement commercial mondial.

[1] Il est passé de 12,693 milliards en 2002 à 42,636 milliards en 2017.

[2] Il est passé de 556 millions en 2002 à 5,129 milliards en 2017.

[3] Leur document de référence 2016 présente un certain nombre de ces initiatives.