La “Loi de 1973” : Rothschild ou Pompidou ?

Rothschild ou Pompidou, qui est à l’initiative de la « loi de 1973 », potentiellement responsable du déficit budgétaire français depuis 45 ans ?

 

« Il n’y a que deux manières de conquérir une nation, l’une est par les armes, l’autre par la dette », disait John Adams, deuxième président des Etats-Unis d’Amérique.

Ah la fameuse « loi de 1973 »… Fameuse ? Pas tant que ça finalement… Mais que dit cette loi qui, malgré le fait qu’elle soit passée dans un silence médiatique presque total, a radicalement modifié la politique monétaire et budgétaire de l’Etat français ?

La « loi du 3 janvier 1973 sur la Banque de France », également appelé « Loi Pompidou – Giscard – Rothschild », est une loi qui a donc été passée le 3 janvier 1973, et qui modifiait le statut de la Banque de France, et interdisait désormais l’Etat français de s’endetter auprès de sa propre banque centrale, sans avoir à verser des intérêts.

Dans cette loi portant sur la réforme des statuts de la banque de France, nous pouvons trouver en particulier cet article 25, très court, qui bloque toute possibilité d’avance au trésor :

« Le Trésor public ne peut être présentateur de ses propres effets à l’escompte de la banque de France. »

Petit rappel sur le fonctionnement de la création monétaire.

La monnaie représente une « reconnaissance de dette », en échange d’un bien ou d’un service. Celle-ci peut être fiduciaire (billets, pièces) ou scripturale, inscrite dans des registres, et peut être utilisée par celui qui la reçoit pour acquérir un autre bien ou un service. Cette « reconnaissance de dette » circule donc d’une main à une autre. L’Etat étant à l’origine garant de la monnaie. Afin de pouvoir développer l’activité économique d’un état, une banque nationale produisait ainsi des « reconnaissances de dette » (n’ayant encore aucune valeur intrinsèque) de la part de l’état, permettant à ce dernier de réaliser son développement, censé produire une plus-value pour la nation. Le remboursement à la banque nationale de la « reconnaissance de dette » étant possible grâce à cette plus-value. Sans intérêts bien sûr, car il ne s’agirait pas de payer le prêt d’argent fabriqué artificiellement.

Une banque privée réalise quasiment la même chose, à l’exception du fait qu’elle demande des intérêts en plus, et réalise des profits colossaux. Non seulement elle crée des reconnaissances de dette qui lui sont remboursées, mais en plus elle reçoit des intérêts sur la valeur du montant qu’elle a prêté et qu’elle ne possédait en réalité qu’à 10% de la valeur prêtée !

Ainsi, depuis 1973 l’Etat doit désormais s’endetter auprès des banques privées pour financer ses investissements, en devant ainsi payer des intérêts élevés ! Ce qui est en parti la cause du creusement du déficit de la dette publique depuis cette année-là.

Mais c’est aussi et surtout la cause de l’augmentation des prélèvements obligatoires ! Dit d’une autre manière, l’augmentation des impôts directs et indirects que le contribuable français subit fortement depuis 1975 sert en parti à financer les intérêts versés aux banques privées…

Cette loi a ensuite été abrogée en 1992 avec le traité de Maastricht instituant l’Union européenne, qui confiait désormais la politique monétaire au sein des institutions européennes à Bruxelles, pour être remplacé par l’article 104 du traité de Maastricht, et plus tard par l’article 103 du Traité de Lisbonne.

Loi « Rothschild » ?

« Donnez-moi le pouvoir de contrôler l’argent d’une nation, et alors peu m’importe qui fait les lois » disait le baron Mayer Anselm Rothschild.

Cette loi, passé sous la présidence de Georges Pompidou, est souvent appelé « Loi Rothschild » par l’extrême droite française, en référence au fait que l’Elysée se serait « soumis » à ses propres créanciers, à savoir les marchés financiers privés, qui, avec les agences de notation chargées d’attribuer une note aux états, note qui influera ensuite sur le montant d’intérêt à devoir verser en fonction de la note attribuée, formeraient une oligarchie, et seraient devenus une classe dominante, qui dicterait ses propres exigences à toute la classe politique.

« Lorsqu’un gouvernement est dépendant des banquiers pour l’argent, ce sont ces derniers, et non les dirigeants du gouvernement qui contrôlent la situation, puisque la main qui donne est toujours au-dessus de la main qui reçoit » évoquait Napoléon Bonaparte ; citation qui n’a pu qu’encourager les sympathisants d’extrême-droite de qualifier ainsi cette loi, Rothschild étant devenu le stéréotype du tout-puissant banquier.

Le fait que Georges Pompidou ait été banquier chez Rothschild en 1953 y est certainement aussi pour beaucoup dans cette appellation…

Pour quelles raisons décider une telle loi ?

La première justification, et certainement celle qui fût le plus mis en avant, est la lutte contre l’inflation (augmentation du niveau général des prix) par la réduction de la masse monétaire en circulation.

Cela dit, cette explication ne tient que très peu la route, pour la simple et bonne raison que cette loi n’a eu que très peu d’influence sur la maîtrise de l’inflation, qui a quasiment doublé un an après que la loi fût passée, et sachant qu’en 1973, la maîtrise de l’inflation n’était pas une priorité du Parlement. Et si l’on devait s’en tenir aux chiffres, en 1979 la dette publique française s’élevait à quasiment 240 milliards d’euros, et 30 ans plus tard, celle-ci s’établissait à 1327 milliards d’euros en 2009 ! Ainsi, la dette a depuis augmenté d’environ 1087 milliards d’euros, et les citoyens ont payé plus de 1300 milliards d’euros d’intérêts.

Cette loi a tout de même eu l’avantage d’arriver, pour la première fois, à mettre d’accord Marine Le Pen et Jean Luc Mélenchon ! Effectivement, les deux chefs de partis opposés étaient du même avis sur les effets négatifs de cette loi, et sur les raisons qui ont motivés son existence. Ainsi, le leader de la France Insoumise, évoquait dans son programme le fait que « dès 1973, l’État a renoncé à sa prérogative de battre monnaie ».

Dans la même période, durant les élections présidentielles de 2012, la présidente du Front nationale déclarait : « Depuis une loi de 1973, notre pays n’a plus la possibilité d’emprunter directement à taux très bas à la Banque de France comme cela se pratique dans de nombreux pays du monde. »

Rappelons également que la dernière année où l’Hexagone présentait un budget excédentaire remonte à 1974, soit un an après que cette loi fut passée… Depuis lors, la France est déficitaire, depuis maintenant 44 ans. Coïncidence ? Ou le creusement du déficit serait-il lié à d’autres phénomènes comme les chocs pétroliers des années 70, qui marquait la fin des trente glorieuses ? Ou peut-être est-ce dû aux effets de la mondialisation ?

Aujourd’hui encore, l’existence de cette loi, qui est toujours en vigueur désormais à travers l’article 123 du traité de Lisbonne, suscite toujours autant d’émotion, et soulèvent toujours de nombreuses interrogations et de nombreux désaccords.

Tout ceci semble très complexe, mais c’est peut-être la complexité du système financier qui fait qu’il n’y ait finalement eu aucune protestation massive venant de la population jusqu’à maintenant, concernant les dégâts que la loi du 3 Janvier 1973 aurait causés et aurait coûtés aux citoyens français.

Comme le disait Sir Henry Ford :

« Si le peuple comprenait le fonctionnement du système bancaire et monétaire, je crois qu’il y aurait une révolution avant demain matin ».

Les banques ont donc encore de beaux jours devant elles !